Artisan de compassion Partie 1 : Introduction à la compassion

Artisan de compassion Partie 1 : Introduction à la compassion

Choisir la compassion

La capacité à penser et à avoir une représentation de soi distingue l’humain des animaux. L’humain a en effet développé une formidable capacité à imaginer, à rêvasser, à ruminer, à planifier, à raisonner, etc. Aussi, l’humain réfléchit à la personne qu’il voudrait être et à la vie qu’il souhaite avoir. Toutes ces aptitudes ont donné lieu au monde actuel tel qu’on le connait : à l’évolution de la science, à la culture populaire, aux cellulaires, etc.

Mais ces capacités peuvent également être source de détresse. Par exemple, nous pouvons ruminer sur le fait que nous ne sommes pas aussi heureux que nous le souhaitons ou repasser en boucle des critiques négatives concernant notre corps.

Nous pouvons d’ailleurs avoir l’impression que nous n’avons pas de contrôle sur ce processus du cerveau. Alors, bien souvent, l’humain a tendance à laisser libre cours à son mental. Il le laisse ruminer, appréhender, critiquer.

Le danger est que, plus nous laissons notre mental prendre cette direction, plus nous entretenons des émotions désagréables. Par exemple, critiquer négativement notre corps donnera lieu à plus de honte et d’insatisfaction corporelle. La bonne nouvelle est que nous pouvons apprendre à prendre du recul et à observer le flot de nos pensées, pour ensuite choisir la direction où porter notre attention.

Nous n’avons pas choisi le fonctionnement de notre cerveau. Nous n’avons pas non plus choisi la capacité à nous critiquer durement ou à ressentir de la honte, de la colère et de l’anxiété. Par contre, nous pouvons prendre la responsabilité de notre mental. Nous pouvons choisir de ne pas nous laisser emporter dans le flot d’une rivière de pensées autodestructrices.

 

Qu’est-ce que la compassion?

La compassion et la pleine conscience peuvent devenir nos pagaies pour nous aider à naviguer les émotions ou les pensées douloureuses.

La définition la plus répandue de la compassion est celle du Dalaï-Lama : une sensibilité à la souffrance de soi et des autres, avec un engagement à essayer de la soulager [1].

Il y a 4 qualités qui distinguent une personne qui fait preuve de compassion [1]:

  1. Sagesse

La sagesse provient de la compréhension des souffrances de l’humain.

  1. Force

La force correspond au courage et à la détermination. La force permet d’être témoin de la souffrance, d’y être sensible et de tolérer les difficultés. Elle inspire le calme, la confiance. Elle permet d’agir lorsque nécessaire.

  1. Chaleur et gentillesse
  2. Attitude sans autocritique et sans jugement

Une personne qui fait preuve de compassion perd l’intérêt à condamner et à blâmer. Elle souhaite faire ce qui est possible pour s’aider ou pour aider les autres à avancer dans une situation difficile. Elle prend responsabilité, mais sans juger ni critiquer. En somme, la compassion est une aptitude qui nous permet d’entretenir une position bienveillante envers soi et les autres.

 

Pourquoi cultiver la compassion pour soi?

Quand vous avez très faim et que vous avez devant vous un plat délicieux, que se produit-il dans votre corps? La vue du repas stimule une région de votre cerveau, qui envoie ensuite des messages à votre corps. Vous commencez par exemple à saliver. Maintenant, supposons que vous avez très faim, mais qu’il n’y a pas de nourriture dans votre champ visuel. Vous fermez les yeux et vous imaginez un bon repas à la place. Qu’arrivera-t-il dans votre corps? Vous saliverez quand même. Pourquoi? Car les images que nous créons dans notre mental envoient aussi des messages à certaines parties de notre cerveau. L’image mentale est donc suffisante pour stimuler les mêmes réactions physiologiques.

Voyons un deuxième exemple. Supposons que vous êtes au travail, où un collègue vous intimide et a des paroles blessantes à votre égard. Le niveau de cortisol, l’hormone du stress, risque probablement d’augmenter dans votre corps. Vous pourriez alors ressentir de l’anxiété. Maintenant, imaginez que vous êtes votre propre intimidateur : vous vous critiquez et vous vous rabaissez très souvent. En faisant cela, vous stimulez aussi des sensations ou des émotions désagréables. Ces exemples montrent que les pensées et les images que nous créons stimulent des réactions puissantes du cerveau et du corps.

Inversons maintenant ces situations. Imaginez que vous faites une erreur et que vous êtes fâchés envers vous-même. Si quelqu’un a une attitude accueillante, bienveillante et compréhensive envers vous, cela réduira sans doute l’intensité de votre frustration.

Ainsi, plutôt que de suivre l’automatisme des pensées autodestructrices, nous pouvons choisir d’orienter notre mental vers des pensées et des images de compassion pour nous-mêmes. En apprenant à faire preuve de plus de compassion envers soi, à générer des pensées et des images de compassion, cela permet de ressentir plus de compassion pour soi-même. Au fil du temps, cette attitude de compassion nous apaisera et nous aidera à passer au travers des moments plus difficiles.

 

Attention!

Ressentir de la compassion pour soi est une aptitude qui se développe. Pour se sentir différemment et ressentir de la compassion pour soi, il faudra d’abord cultiver la compassion. Au début de votre nouvelle pratique, vous générerez probablement des pensées alternatives empreintes de compassion, mais en les entendant d’une façon froide et détachée. Focalisez-vous plutôt sur votre intention de ressentir de la compassion. Pour vous aider, souvenez-vous des quatre qualités de la compassion.

Je présenterai, dans un autre billet, quelques pistes concrètes pour cultiver la compassion.

Écrit par Dre Marie-Eve Turgeon, psychologue

 

Référence

  1. Gilbert, P. (2010). Compassion focused therapy: The CBT distinctive features series. Hove, England: Routledge.
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